Les tableaux mouvementés de Denyse Thomasos au Musée McMichael
Artiste torontoise
Publication: L’Express
Published: July 31, 2021
Author: Mary Elizabeth Aubé
Les tableaux épiques de Denyse Thomasos, une artiste née à Trinidad et qui a grandi à Toronto, sont à l’honneur dans une exposition au Musée McMichael.
Le Musée McMichael est maintenant ouvert et des billets chronométrés sont disponibles en ligne.
Denyse Thomasos a étudié à l’Université de Toronto
L’art de Denyse Thomasos utilise les techniques de l’abstraction. Mais en même temps, il évoque la figure humaine en incorporant des structures qui rappellent les bateaux, tombes, cavernes et bâtiments… Ce sont autant de contenants pour nos corps.
Elle arrive au Canada à l’âge de six ans. Fait un bac à l’Université de Toronto à Mississauga. Puis une maîtrise à l’Université Yale dans le Connecticut. Et devient professeure à l’Université Rutgers au New Jersey.
Elle expose ses œuvres dans des galeries à Toronto et à New York et reçoit des bourses du Conseil des Arts du Canada et des fondations Guggenheim et Pew aux États-Unis. Nous la perdons trop tôt en 2012 lorsqu’elle est dans la quarantaine.
Passion pour le mouvement
Cette exposition coïncide avec l’acquisition par le McMichael d’une œuvre majeure de Denyse Thomasos, Odyssey, d’où le titre de l’exposition.
En effet, son intérêt pour le voyage est lié à sa passion pour le mouvement, évoqué dans toutes ses œuvres, et aussi à son intérêt pour l’expérience de la diaspora africaine.
Gaëtane Verna, directrice de la galerie Power Plant à Harbourfront, remarque que, pour Denyse Thomasos, «l’engagement politique était fondamental». Certaines de ses œuvres rappellent l’entassement des gens dans les navires d’esclaves ou dans les prisons modernes américaines.
Lignes droites sur des fonds aux couleurs vives et variées, formes multipliées, superposées et rythmées comme une foule qui grouille dans la rue, voilà les moyens artistiques employés pour réaliser ses tableaux.
L’expérience de la diaspora africaine
Grâce à la superposition, «on ne sait trop si on regarde un chantier naval ou une ville ou une chambre mortuaire», selon Sarah Milroy, conservatrice en chef du McMichael. «Ses images sont merveilleusement ouvertes.»
Denyse Thomasos évoque un paradoxe: des structures qui nous définissent et nous confinent, que ce soit sur le plan architectural, social ou politique, et aussi, selon l’artiste June Clark, l’énergie de la joie et de la survie.
Pourtant, «ses images n’ont pas l’air d’être ancrées», dit Gaëtane Verna, qui croit que ce flottement trouve son origine dans l’expérience de la diaspora africaine.
Denyse Thomasos comparée à Goya
Souvent de taille monumentale, certains tableaux s’étendent sur des murs entiers. Selon June Clark, les œuvres de Denyse Thomasos sont «monumentales par leurs idées».
Elle les compare aux œuvres de l’artiste espagnol Goya. Les deux artistes, dit-elle, font «une observation profonde sur l’existence humaine et révèlent des cauchemars, des rêves et des visions.»
Selon Sarah Milroy, elle aborde des sujets difficiles d’une façon rigoureuse, mais aussi avec beaucoup de cœur. «Elle ramasse toute cette histoire tragique et épique et la porte vers l’avenir, en se demandant et en montrant ce qui est possible et où nous allons.»
L’art du Canada dans son ensemble
Avec cette exposition, le musée McMichael poursuit l’élargissement de sa mission, qui à l’origine était de préserver et promouvoir l’héritage du Groupe des Sept, et qui est désormais de faire connaître l’art du Canada dans son ensemble.
Le catalogue de l’exposition contient un essai par l’écrivaine Esi Edugyan.
Les commentaires par Gaëtane Verna et June Clark sont tirés d’une discussion animée par Sarah Milroy qui est disponible sur le site du McMichael.
Denyse Thomasos: Odyssey au Musée McMichael jusqu’au 24 octobre. À ne pas manquer.